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Suite du point de vue de Nestor BINGOU, sur la question de l’intérim de la présidence de la république : Vous êtes nombreux à avoir indexé la longueur de ce post. Je partage totalement ce constat. Mais en réalité, rien d’extraordinaire n’y était abordé.

Le fauteuil présidentiel attendant son locataire…

Je m’attelais simplement à démontrer que le juge constitutionnel, en actant l’indisponibilité temporaire de Monsieur Ali Bongo Ondimba, le mettait de facto, par cette décision, en marge de la République pour une durée non détermonée. Il ne serait d’aucune logique d’imaginer un individu à la fois indisponible et en activité. Nous sommes institutionnellement ou administrativement, soit indisponible, soit en activité, et non les deux positions simultanément.

La première conséquence juridique de la décision de Cour est alors la mise en congé temporaire de monsieur Ali Bongo Ondimba. Par respect du parallélisme de formes, si la Cour l’estime désormais apte à reprendre ses fonctions, elle devrait l’acter dans une autre décision de reprise de fonctions qui donnerait force légale à ses actes juridiques.

La deuxième conséquence juridique de la décision de la Cour est le sort des actes juridiques accomplis par Monsieur Ali Bongo Ondimba pendant cette période d’indisponibilité. De toute evidence, ces actes relèvent de son activité privée. Ainsi, le décret de nomination du nouveau Gouvernement, la prestation de serment des ministres, le Conseil des ministres et toutes les nominations qui en découlent, sont en réalité reputés n’avoir aucune couverture de puissance publique et ne devraient en aucune façon engager l’Etat gabonais.

La troisième conséquence juridique de la décision de la Cour est la déclaration de la vacance temporaire de l’Institutuon présidentielle. En constatant cette indisponibilité temporaire, la Cour a légitimé la vacance temporaire de l’institution présidentielle. Elle devrait alors, par la même décision, régulariser la question de l’intérim du président de la République gabonaise, en tant qu’organe régulateur du fonctionnement des institutions, et parce que le sacro-saint principe de la continuité de l’Etat la commande de ne jamais laisser vacante une institution de la République, même pour une seconde.

L’une des faiblesses notées de cette décision de la Cour tient de ce qu’elle n’ait réglé cette question d’intérim qu’uniquement pour tenir un Conseil des ministres et non pour toute la durée de l’indisponibilité temporaire de Monsieur Ali Bongo Ondimba. Telle est la source de toutes les confusions actuelles: des soupçons de falsification de la signature du Chef de l’Etat, guerre des clans, incertitude sur la personne qui dirige le pays, blocage du compte du gabon à la BEAC,etc. Même en cas de modification constitutionnelle aujourd’hui comme nous l’entendons ici et là, nous serions curieux de connaitre l’identité de l’autorité qui la promulguerait.

Certains d’entre vous ont noté qu’en vertu de l’interdiction qui est faite au juge de ne statuer ultra petita, c’est-à-dire au-delà de la demande des parties, la Cour ne pouvait pas se prononcer sur la question de l’intérim qui n’avait aucun rapport avec la demande du Gouvernement se rapportant à l’interprétation des articles 13 et 16 de la constitution et à la procédure à entreprendre en vue de la tenue d’un Conseil des ministres qui règlerait les Affaires de la Nation. Cet argument ne saurait prospérer dans cette espèce pour trois raisons:

La première raison est qu’il appartient au juge de donner aux faits leur juste qualification. Si le juge Constitutionnel s’y étais mis, il réaliserait qu’en fait de la question de la tenue d’un conseil des ministres, il s’agissait en réalité de la préoccupation globale de l’intérim de Monsieur Ali Bongo Ondimba qui pénalise le fonctionnement régulier du Conseil des ministres.

La deuxième raision est que cette interdiction qui est faite au juge de ne pas statuer ultra petita a un tempérament en Droit que l’on appelle le pouvoir d’évocation du juge, en vertu duquel, il est autorisé à aller au-delà des demandes des parties. La Cour Constitutionnelle, par une jurisprudence constante, s’est arrogée depuis longtemps ce pouvoir d’évocation du juge. C’est en considération de cette jurisprudence constante qu’en 2016 elle a cru bon d’annuler 21 procès verbaux du centre de vote de kembo, alors même que la demande principale de monsieur Jean PING n’avait trait qu’à la reformation des résultats de la province du Haut Ogooué et qu’en bon droit, la demande reconventionnelle du PDG ne pouvait s’étendre au-delà de ce cadre.

La troisième raison est que la Cour a réglé la question de l’intérim, mais uniquement pour résoudre quelque chose de ponctuelle, la tenue d’un conseil des ministres, laissant entière toute la préoccupation et alors même qu’elle en avait la compétence.

La Cour ne peut donc se prévaloir de cette interdiction pour se soustraire de l’obligation qui lui est faite de régler la question de l’intérim de l’institution présidentielle.

En somme, j’indiquait que pour la légalité des actes juridiques de la Nation, il est plus qu’urgent que cette préoccupation d’intérim soit réglée dans les meilleurs délais.

Pour moi, le choix devrait porter en toute logique sur un des proches collaborateurs du Chef de l’Etat. Il s’agit, soit sur le Directeur de Cabinet du Président de la République, soit sur le Vice-Président de la République qui a déjà présidé un Conseil des ministres, soit sur le Secrétaire général de la Présidence de la République.

Voici en résumé la substance de mon post du 12 mars 2019.

Nestor BINGOU, Magistrat,
Ancien Procureur de la République

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