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Il y a 50 ans mourrait Léon Mba et arrivait au pouvoir Albert Bongo qui inaugurait un régime prédateur et prévaricateur qui est aujourd’hui au faîte de sa puissance destructrice. A l’occasion de ce sinistre anniversaire, il convient de rappeler des faits rien que des faits qui n’ont rien à voir avec la légende officielle, la propagande du Parti-Etat devenu l’Etat-PDG. Une œuvre de salubrité publique en quelque sorte.

1. Léon Mba n’est pas le père de l’indépendance du Gabon.

Léon Mba voulait que le Gabon devienne un département français, comme La Creuse ou la Gironde. Il a d’ailleurs convaincu le Gouverneur du Gabon de l’époque Louis San Marco qui ira plaider chez le ministre d’Outre-Mer Cornut Gentille la départementalisation du Gabon visant à faire des Gabonais de bons petits Français aux cheveux crépus.

C’est ce qu’il raconte dans Le Colonisateur colonisé (p. 211.) : « Le Conseil de gouvernement du Gabon choisit la départementalisation, et Léon (Mba) me chargea de négocier la chose avec Paris. Je considérais cela comme un triomphe, le triomphe de cent trente années de colonisation française qui débouchaient sur cette demande d’intégration, le triomphe posthume des marins, des missionnaires, des médecins, forestiers, colons, administrateurs, qui avec tous leurs défauts, toutes leurs erreurs, n’avaient finalement pas si mal travaillé dans ce pays pour y faire aimer la France à ce point. Pourquoi ne pas le dire ? Comme un petit triomphe personnel aussi : pour un bradeur d’Empire, je ne m’étais pas si mal débrouillé, même si mon seul mérite avait été d’être là pour recueillir l’héritage du passé. Je pensais bien être reçu comme un triomphateur qui ajoutait une perle de plus à la couronne. Je fus reçu comme un chien dans un jeu de quilles.

Le ministre, Bernard Cornut-Gentille, fut même désagréable : “Sanmarco, vous êtes tombé sur la tête !… N’avons-nous pas assez des Antilles ? Allez, l’indépendance comme tout le monde !” ». Quant à Charles de Gaulle, il était hostile à l’idée de Léon Mba : « Au Gabon, Léon M’Ba voulait opter pour le statut de département français. En pleine Afrique équatoriale ! Ils nous seraient restés attachés comme des pierres au cou d’un nageur ! Nous avons eu toutes les peines du monde à les dissuader de choisir ce statut ». Expliquant clairement que « Nous ne pouvons pas tenir à bout de bras cette population prolifique comme des lapins (…). Nos comptoirs, nos escales, nos petits territoires d’outre-mer, ça va, ce sont des poussières. Le reste est trop lourd ».

Léon Mba tenait tellement à son idée qu’il ira même jusqu’à proposer comme drapeau du Gabon, le drapeau français avec un Okoumé en son centre ! Face à l’opposition de Jacques Foccart, il proposera le drapeau actuel du Gabon avec dans un coin…un petit bout de drapeau français. Le drapeau tricolore actuel vert-jaune-bleu sera finalement adopté au grand dam de Léon Mba.

Toujours est-il que devenu le président du pays, dont il ne voulait pas l’indépendance, Léon Mba déclarera à l’aéroport d’Orly le 22 mars 1961 à un De Gaulle visiblement ennuyé : « Tout gabonais a deux patries : le Gabon et puis la France ».

2. Un curieux démocrate aux victoires soviétiques.

Léon Mba a pris part à deux élections sans affronter qui que se soit. Sa première élection le 12 février 1961, il la doit au désistement de ses adversaires politiques notamment au plus emblématique, Jean Hilaire Aubame, ancien député à l’assemblée nationale française et 1er maire noir de la commune de Poto-Poto au Moyen-Congo. L’argument qui avait été trouvé par les « conseillers » était qu’il fallait privilégier « l’unité nationale » et travailler ensemble. Mal leur en prendra. En 1967, alors qu’il est hospitalisé à Paris où il est soigné pour un cancer et que son principal adversaire Jean Hilaire Aubame est dans la sinistre prison de Dom les Bam à la suite du coup d’Etat de 1964.

3. Léon Mba a jeté en prison plusieurs députés dont le président de l’Assemblée nationale.

Dans la nuit du 16 au 17 novembre 1960, Léon Mba a fait arrêter des députés pourtant membres de son parti le Bloc Démocratique Gabonais (BDG), malgré leur immunité parlementaire. Parmi ces élus se trouvent Paul Gondjout (président de l’Assemblée nationale) et Luc Ivanga. Leur tort : avoir souhaité un régime parlementaire au Gabon pour maintenir l’équilibre des trois pouvoirs. Paul Gondjout et ses compagnons seront jetés en prison.

4. Léon Mba est le père du monopartisme au Gabon.

Contrairement à ce que tout le monde raconte et clame, Omar Bongo Ondimba n’est pas le père du monopartisme au Gabon. C’est Léon Mba qui l’a clairement exprimé en ces termes lors d’une interview accordée à Jacques Alexandre journaliste à l’ORTF le 18 février 1964 : « je crois que l’opposition contrariait nos desseins. Il faut absolument qu’il ait un parti unique ».

5. Le coup d’état de 1964 était une opération de défense du multipartisme galvaudé par Léon Mba.

Comme dit précédemment, Léon Mba voulait instaurer le régime du parti unique au Gabon. C’est dans cette optique qu’il charge en 1963 Jean Hilaire Aubame, alors ministre des Affaires étrangères de créer le parti unique. Aubame bien entendu refuse et les ministres membres de L’Union démocrate et sociale gabonaise (UDSG) sont éjectés du gouvernement à l’exception de François Meye qui rejoint Léon Mba.

Alors qu’il s’apprête à retrouver son siège de député, Jean Hilaire Aubame est nommé président de la Cour suprême. Au même moment, il fait passer une loi qui interdit le cumul de mandats. Contrairement aux plans de Léon Mba, Aubame démissionne de son poste de président de la Cour suprême et retrouve le parlement où le parti de Léon Mba est majoritaire à 70%.

Le 21 janvier 1964, Léon Mba dissout l’Assemblée nationale et en profita pour changer et réduire les districts électoraux qui passèrent de 67 à 47. Obligeant les partis à présenter des candidats dans tous les districts alors qu’il avait fixé la caution pour se porter candidat à 160 dollars US, non sans avoir pris soin de vérifié que ses adversaires ne disposaient pas des ressources nécessaires. Et pour finir, Léon Mba fit voter une loi interdisant ceux qui avaient occupé récemment des hautes fonctions en soient exclus. Jean Hilaire Aubame tombait sous le coup de cette loi. En réponse, l’opposition décida de boycotter les élections législatives, refusant de participer à des élections malhonnêtes.

C’est alors que l’armée décida d’intervenir dans la nuit du 17 au 18 février 1964. Sous le commandement des lieutenants Jacques Mombo et Valère Essone, 150 militaires gabonais déposèrent Léon Mba sans tirer le moindre coup de feu. Le conduisirent à la radio où il annonça sa démission en ces termes : « Le jour J est arrivé, les injustices ont dépassé la mesure, ce peuple est patient, mais sa patience a des limites… il est arrivé à bout ».
Un gouvernement provisoire civil est formé pour assurer la transition. Mais c’était sans compter sur l’interventionnisme de la France Gaullienne qui décida d’envoyer ses paras parmi lesquels Maurice Robert pour rétablir « l’ordre ». Le combat est inégal mais les militaires Gabonais se défendent avec héroïsme et lors de l’attaque du dernier bastion des militaires gabonais au mortier et par avion de chasse, le lieutenant Ndo Edou refusa de se rendre en criant : « Je préfère mourir dans l’honneur que de vivre dans la honte » avant d’être abattu. Léon Mba sera remis en place et il pourra mettre en place son vieux rêve : être le seul maître du Gabon et mater tous ceux qui osaient élever la voix.

6. Léon Mba faisait tabasser ses opposants publiquement.

Le retour de Léon Mba au pouvoir n’a pas été accepté par les populations. Régulièrement, on pouvait assister à des manifestations où Léon Mba était traité de dictateur et de « président des Français ». En réponse, les détracteurs sont sévèrement passés à tabac. Et malgré la tenue des élections législatives en avril (remportés malgré les fraudes à seulement 54% par le parti de Léon Mba !) en octobre, on assiste encore à des exactions dans les rues de Libreville.

Le 8 octobre 1964, l’Ambassade des Etats-Unis affirme dans un câble diplomatique au State Département que le « règne de terreur » qui avait débuté vers le 23 septembre continue sans diminuer. « Des signes de troubles sont évidents et le peuple manifeste son mécontentement devant les mesures répressives de Mba. Hier, un groupe de prisonniers politiques a été promené nu à travers la ville et publiquement battu avec des clubs de golf et des crosses de fusils. À la session d’ouverture de l’Assemblée, deux députés ont été arrêtés et la police en recherche un troisième ».

7. Il est le seul président à s’être fait élire sur un lit d’hôpital parisien, à plus de 5000 km de son pays !

Léon Mba a quitté le Gabon malgré lui car gravement malade en août 1966. Il est hospitalisé à Claude Bernard à Paris. Et c’est depuis sa chambre d’hôpital qu’il nomme Albert Bongo, jusque-là ministre délégué à la présidence (Premier ministre en fait), Vice-Président du Gabon le 14 novembre 1966.

Le 19 mars 1967, Léon Mba et Omar Bongo se présentent sur un ticket unique – la Constitution ayant été préalablement réaménagée en ce sens – à la présidence du Gabon. Le binôme Mba-Bongo est élu à 100% des voix et leur parti remporte 100% des sièges à l’Assemblée. Léon Mba réussira à se rendre à l’ambassade du Gabon à Paris pour y prêter serment devant des officiels venus de Libreville et en compagnie de son tout nouveau Vice-Président Albert Bongo. Léon Mba meurt à Paris le 27 novembre 1967. Son successeur Omar Bongo devient officiellement le Président du Gabon le 2 décembre 1967.

Source : Infos241

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