Gabon/ Liquidation de la société Assurances du Gabon SA : comme des soupçons d’entourloupe.
Décidée par ordonnance du Tribunal de commerce de Libreville du 29 mai 2020, à la suite d’une requête de la Conférence internationale des marchés d’Assurances (CIMA), la liquidation des biens de la société Assurances du Gabon se fait-elle dans les règles de l’art ? Les agents déflatés de l’entreprise créée en juillet 2015, qui a brassé des milliards de FCFA en son temps et laissé un immeuble en construction, en doutent.
Dénonçant des insuffisances dans la liquidation de la société par le syndic judiciaire désigné liquidateur, Mme Yvette Ngwevilo Rékangalt, les anciens employés d’AG, dans une lettre datée du 13 juillet 2022, viennent de solliciter l’intervention de Madame le Ministre de l’Economie et de la Relance, lui demandant de contraindre les courtiers débiteurs et l’actionnaire principal à s’acquitter des sommes dues à la société.
Les agents, au nombre de 23, s’inquiètent de ce que la procédure de liquidation d’AG s’achemine vers son terme, les six derniers mois sollicités par le liquidateur auprès du Tribunal de commerce de Libreville étant déjà presque consommés, sans que ce dossier sulfureux ait réellement retenu l’attention des pouvoirs publics et sans que les solutions idoines aient été trouvées pour eux et pour les assurés sinistrés dont des instances restent impayées.
Le dossier est pourtant bien connu de la Direction Nationale des Assurances du Gabon (DNA), qui semble ne pas bien suivre le processus de liquidation. De plus, l’opacité de la démarche souhaitée par la CIMA se confirmerait, selon les agents, par le fait que tous les documents ayant mis fin aux activités d’AG n’ont jamais été publiés dans un journal d’annonces légales, comme souhaitées par les décisions de la commission régionale de contrôle des assurances CRCA.
En effet, c’est en sa 95e session ordinaire du 29 avril au 04 mai 2019, que la CRCA, instance de la CIMA, réunie à Abidjan en Côte d’Ivoire, prend la décision d’interdir d’exercer à Brice Jean de Dieu Enguenya, Gabonais, Directeur général et actionnaire principal de la société Assurances du Gabon.
Cette première sanction (décision n°002) est suivie de la décision n°025 de la CRCA retirant la totalité des agréments à la société Assurances du Gabon, prise par la commission dans sa session ordinaire réunie du 28 octobre au 02 novembre 2019 à Dakar au Sénégal.
La Commission technique de la CIMA appuyait sa décision en relevant de nombreux griefs reprochés au Directeur général d’AG. Au nombre de ces derniers : la non-respect des engagements pris envers les souscripteurs, assurés et bénéficiaires de contrats d’assurances, l’Etat, le personnel et d’autres créanciers ; une situation financière caractérisée par un besoin de financement de 5073 millions de FCFA (5 milliards ?) sur la base des comptes de l’exercice 2017 ; l’incapacité des actionnaires à produire un plan de financement crédible en dépit des différents passages des dirigeants suspendus
devant la commission ; la non production des comptes d’exécution semestriels de son programme d’activités dans les trois premiers exercice…
Il convient de préciser que la décision interdisant d’exercer infligée à Brice Jean de Dieu Enguenya était lourde de sens, parce qu’elle la privait totalement du droit, «à un titre quelconque, de fonder, diriger, administrer, gérer et liquider les entreprises soumises au contrôle régional de la Commission régionales de contrôle des Assurance, conformément aux dispositions du code des assurances».
Nous reviendrons plus tard sur les détails de cette décision, qui fait état de manquements graves, pour ne pas dire, de l’utilisation massive des ressources de l’entreprise à des fins personnelles.
Malgré le fait qu’un administrateur provisoire avait été désigné à la tête d’AG, les agents déflatés pensent que l’actionnaire principal et Directeur général ait gardé la haute main sur la gestion du dossier et qu’il bénéficierait d’importants parapluies justifiant le fait qu’il n’ait jamais été inquiété. Il y a lieu, aujourd’hui, de vérifier où sont partis les fonds reçus de la vente du siège qu’il avait mis en construction, devenu le siège du Conseil supérieur de la Magistrature au quartier London de
Libreville ?
Dans les moyens qu’elle a pu récupérer de la liquidation, Mme Ngwevilo Rekangalt a réglé en partie les créances d’AG, dont une partie des sommes dues aux employés, que l’on chiffre à près de 100 millions de FCFA, jusqu’à il y a un an. Depuis, plus rien. La réaction du ministre de l’Economie et de la Relance est vivement attendue, tout comme les explications du syndic judiciaire, qui semble, elle-même, ne pas être en odeur de sainteté avec la
CIMA.
Affaire à suivre.
FB