Gabon / Pilotage maritime : Un manque à gagner pour l’Etat ou un jeu de dupe ?
L’incident observé le 22 mars 2020, en plein Port d’Owendo aux environs de 14h00, dont l’auteur n’est nul autre qu’un pilote maritime employé de la société GPM, le commandant Jean Nicodème Kolo, révèle l’indiscipline des opérateurs portuaires, l’insécurité du domaine et surtout la cacophonie voilée que connaît le secteur. Sinon, comment comprendre qu’un pilote commissionné par un concessionnaire agréé, à bord d’un navire minéralier chargé de Manganèse, daigne refuser d’obptempérer tel un pirate, aux injonctions du Commandant du Port Romaric Ebinda qui, lui demandait via la Vigie, de mouiller le navire, conformément à une décision prise par la direction générale de la marine marchande ? Un acte de défiance qui ne saura être anodin et, qui suscite des interrogations approfondies sur la gestion et la politique nationale du pilotage maritime en république gabonaise…
La réglementation :
A la base, les textes réglementaires, permettant de réguler la marine marchande et le pilotage portuaire sont pourtant clairs. Sauf qu’à ce qui semble, leurs applications souffrent de mépris et d’ironie de la part de certains opérateurs maritimes véreux et, bien entendu, de certaines autorités portuaires corruptibles et/ou corrompues. A titre de rappel, l’article 644 et suivant du règlement N°08/12- UEAC-088-CM-23 du 22 juillet 2012, portant code communautaire de la marine marchande et des dispositions de l’arrêté n°00480/MT du 26 septembre 2016, portant délimitation des zones de pilotage maritime et fixant les conditions de leur exploitation dans les eaux sous juridiction nationale, sont pourtant limpides et accessibles à tous les concessionnaires portuaires, pilotes maritimes, amateurs, consignataires de navire et autres…
Mais à quel niveau se situe le nœud de la problématique du pilotage maritime ? Est-ce au niveau du mécanisme de gestion globale des dividendes, ou au niveau du management général des divers exploitants sur les 800 km de côtes que regorge le Gabon ?
A qui profite les abus des opérateurs agréé ?
A ce qui paraît, les opérateurs économiques agréés du domaine de la marine marchande, auxquels l’autorité portuaire qu’est l’Oprag a accordé l’autorisation d’exercer, se croient être au-dessus de la loi. Profitant de la naïveté et de l’inefficacité de certaines autorités, en surexploitant sans vergogne le pilotage maritime dans les eaux sous juridiction gabonaise. Des concessionnaires qui, se croient tout permis pour avoir dealé avec des lobbies puissants tapis dans l’ombre. Toute chose qui, aura suscité le ras-le-bol en 2017 de l’ancien DG de l’Oprag, Rigobert Ikambouayat Ndéka, exprimé à travers une note circulaire. Sans omettre les notes de cadrage et de sanction réglementaires, diffusées par les DG qui se sont succédés à la tête de la direction générale de la marine marchande. Jusqu’à lors, qu’est-ce qui n’a pas marché ?
En dépit de ces mesures barrières entreprises pour la bonne marche de l’activité de pilotage des navires, le problème est resté entier, car aucune réforme évolutive en matière de politique de pilotage maritme au Gabon, n’a été véritablement mise en exergue par les plus hautes autorités. Or, pour développer le secteur, il faut réorganiser les responsabilités à l’image de la pyramide de Maslow. Ce, pour permettre à chaque service de comprendre et de respecter à la lettre les termes de référence de sa mission. Fort de cela, ne serait-il pas impératif de redéfinir au niveau de la tutelle, le rôle de l’Oprag et celui de la direction de la Marine marchande ? Ceci permettra de savoir par exemple, à qui incomble la gestion et le suivi technique du pilotage maritime au Gabon.
L’Etat ne devrait-il pas revoir méculeusement les attributions qui sous-tendent l’autorisation d’exercer accordées aux opérateurs GPM et Sotrasmar, pour éviter que l’incident vécu récemment par les inspecteurs maritimes ne se reproduise ? N’est-ce pas judicieux de faire la part des choses, en délimitant les zones d’exploitation de chaque concessionnaires, de telle sorte que GPM et Sotrasmar n’exercent plus au-delà des stations spéciales de pilotage des ports commerciaux d’Owendo et de Port-gentil ? Sinon, ont-ils suffisamment de pilotes agréés pour assurer l’accompagnement (trois navettes par jour) des navires minéraliers à partir de 10.50 m de tirant d’eau, de la bouée pilote à la bouée thémis, voire plus loin ? Pas du tout évident !
Le manque à gagner des caisses de l’État :
De façon stratégique, pour engranger des dividendes importants dans le secteur, et renflouer les caisses du trésor publique, c’est à l’Etat, via les experts de la Marine marchande, qu’il revient de promouvoir cette activité qui génère depuis quelques années à la faveur des opérareurs, des milliards en catimini. Ce, en formant des gabonais chaque année au métier de pilote portuaire, afin d’assurer la couverture maximale du pilotage des navires minéraliers. Ceci offrirait non seulement de l’emploi aux compatriotes, mais aussi, permettrait de desservir en temps opportun et de manière efficace, sur la base d’une convention liant l’Etat aux ports privés que sont : GSEZ Port, GSEZ Minéral Port et Comilog. Voila qui empêchera aux opérateurs qui croient avoir le monopole du pilotage, de calmer leurs ardeurs irréalistes. Bref, la nécessité d’une réforme s’impose dans le secteur pour y voir un peu plus clair. La tutelle a du pain sur la planche !
Affaire à suivre…
Valéry M