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Raymond ndong Sima

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« Les lieux de prières, églises, mosquées, synagogues et temples, ont été fermés dans les premiers jours qui ont suivi l’apparition de la covid-19 pour en ralentir et en endiguer la propagation. Plusieurs mois plus tard, ces mesures étaient toujours en vigueur »…

Peuple Infos, le journal citoyen numéro un en ligne…

Toutefois, des assouplissements de circonstance ont été apportées ici et là aux mesures adoptées. Ces derniers, tout en respectant une distanciation sociale minimale, ont permis que se tiennent quelques grands rassemblements infiniment plus longs et plus denses que les offices religieux.

Tel a été le cas par exemple pour la tenue des épreuves du baccalauréat ou pour la reprise des cours et des épreuves dans les facultés en vue d’achever l’année académique. De même observe-t-on une tolérance constante sur les marchés où la population va s’approvisionner.

Devant ce qui paraît être une discrimination les croyants, toutes religions confondues, ont commencé à s’étonner du maintien des mesures de fermeture de leurs lieux de cultes.

Après de nombreuses démarches infructueuses, l’église catholique a ainsi décidé de la reprise de ses cultes le dimanche 25 octobre 2020.

Refusant de se voir imposer une évolution de son dispositif réglementaire et ainsi de donner l’impression d’avoir cédé sous la pression de l’église; le gouvernement a alors annoncé des assouplissements de son dispositif général en fixant au 30 octobre la date de réouverture des lieux de prière mais en maintenant des restrictions sur la forme et sur le fond des cultes.

Un bras de fer se trouve ainsi engagé entre l’église du Gabon et le gouvernement à la fois sur un écart de 5 jours sur l’entrée en vigueur des assouplissements et sur leurs contenus. En effet, outre les restrictions sur le nombre de personnes applicables à toutes les religions, les chrétiens catholiques se sont vus interdits de distribuer la communion au cours de leurs offices.

Cette interdiction touche au fondement même de leur culte et pour beaucoup d’entre eux, révèle le véritable objectif du gouvernement à savoir la réduction au silence du discours moral.

Manifestement, cette mesure viole un point clef de l’Accord Cadre entre le Saint-Siège et la République Gabonaise. Celui-ci garantit en effet le libre exercice du culte.

L’interdiction annoncée est une immixtion flagrante dans le déroulement d’un rituel qui constitue précisément le coeur du culte. Une telle décision, qui n’a aucune chance de prospérer, même en décrétant la persécution des intéressés, va bien au delà des compétences du gouvernement qui veut, de manière grossière, se saisir ainsi d’un prétexte pour s’immiscer dans le rituel chrétien et le vider de son essence et de sa substance.

Cette divergence se produit dans un contexte particulier. Un nouvel archevêque vient de prendre ses fonctions à Libreville. Il hérite d’une situation de mécontentement au sein de l’église ou de nombreux prêtres et fidèles faisaient désormais le reproche à son prédécesseur de se montrer par trop conciliant avec le gouvernement.

De son côté le gouvernement, n’a eu de cesse de rogner les marges de manoeuvre de l’église catholique notamment en tirant profit de la volonté de l’archevêque sortant de maintenir des relations apaisées avec l’Etat sachant que les deux derniers présidents (si on exclut la transition) étaient de confession musulmane tandis que de nombreuses personnalités se réclament désormais des églises du réveil.

L’histoire enseigne que c’est dans le domaine de la foi et de la religion que les positions se radicalisent le plus souvent. Les exemples des intégrismes dans tant de parties du monde en attestent.

Le nouvel archevêque n’a littéralement pas de marge de manoeuvre. il est ainsi pris en étau entre sa base qui s’estime flouée et non prise en compte à la mesure de son poids dans la société gabonaise et le gouvernement qui ne cache pas ses velléités de minoration et même de marginalisation de l’église catholique.

Les agressions répétées de la concession de l’évêché de Libreville avec les graffiti sur les murs de la paroisse cathédrale, mais aussi les actes de vandalisme contre d’autres églises ; l’absence de condamnation vigoureuse de ces actes; les attaques dans la presse écrite et radiodiffusée; l’adoption, dans des conditions qui ont écarté un vrai débat ouvert sur une question sociale et morale essentielle, de mesures contraires aux valeurs chrétiennes alors que les chrétiens constituent la majorité de la population : tout cela nourrit depuis un moment maintenant une colère et un besoin de prendre des distances avec le gouvernement.

on aurait tort de faire de ces divergences une question personnelle entre le nouvel archevêque et le ministre d’état chargé de l’intérieur, entre Iba ba et Matha. Tout autre prélat à sa place ferait exactement de même.

En fait, la coupe est pleine et si l’archevêque se taisait une partie de son clergé ferait peut-être défection ou tirerait la corde pour le forcer à en tirer les conséquences par exemple en s’obligeant à la suspendre.

Le clergé fait voeu d’obéissance à son évêque mais en contrepartie ce dernier s’oblige à prendre en considération son opinion pour l’administrer.

Or, nombre de prêtres mais aussi de chrétiens laïcs engagés estiment que le gouvernement n’a eu de cesse depuis un certain temps d’accumuler les violations du vivre ensemble. La conférence des évêques n’a pas d’autre choix que de réagir. L’archevêque qui est, dans une certaine mesure et au moins au plan protocolaire, le premier d’entre eux n’a pas d’autre choix que de reprendre l’initiative.

Certains considèrent que les libertés fondamentales garanties par la Constitution sont gravement bafouées. Après la dépénalisation qui a bousculé le préambule de notre Constitution; la remise en cause de la liberté de culte, l’immixtion dans le rituel du culte catholique, la restriction des libertés de circuler sur le territoire, la mercantilisation des entrées dans les eglises; la liste s’allonge et la dérive s’accélère. La crue semble inévitable.

Raymond NDONG SIMA

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