Gabon/ “Ils ont mis ma femme au sol en lui appuyant le cou” : un conflit foncier tourne au drame à Angondjé
Angondjé Château, commune d’Akanda, est devenu le théâtre d’un drame humain illustrant les dérives des conflits fonciers au Gabon. Nzue Edou Patrick Patrici, un compatriote, voit son foyer détruit et sa dignité bafouée après avoir été expulsé de manière brutale par les forces de l’ordre, sur fond de litige foncier opposant sa famille à un sujet malien, Mahamadou Fofana.
LES FAITS
En 2008, Nzue Edou Patrick Patrici achète une parcelle auprès de Madame Nzassi Marthe Anna, comme en attestent les documents délivrés par l’Agence nationale de l’urbanisme, des travaux topographiques et du cadastre (ANUTTC). Plans de situation et de délimitation en main, il construit une maison et s’y installe avec sa famille, vivant paisiblement pendant plusieurs années.
Cependant, en 2014, Mahamadou Fofana revendique la propriété de cette même parcelle. Il prétend l’avoir achetée auprès des fils de Madame Nzassi, les enfants de la première vendeuse. Une situation qui plonge les deux parties dans une bataille judiciaire. Malgré les preuves documentées présentées par Patrick Nzue Edou, le tribunal tranche en faveur de Fofana, laissant la famille gabonaise dans l’incompréhension et le désarroi.
Ces derniers jours, la situation atteint son paroxysme. Patrick Nzue Edou raconte :
« Ils sont arrivés ici autour de 10h, une troupe d’hommes en tenue de gendarmerie accompagnés d’un huissier. Ils ont frappé fort au portail, demandant à voir un adulte. Je suis sorti pour demander la formule exécutoire, mais l’huissier m’a répondu qu’elle ne me serait remise qu’après leur mission de déguerpissement. Avant même que je ne puisse me présenter, ils avaient déjà commencé. »
Pris au dépourvu et conscient de la disproportion des forces en présence, il décide de contacter son avocat. Pendant son absence, sa femme est agressée par les agents sur place :
« Ils ont arraché son téléphone de force, lui ordonnant de venir le récupérer au ‘Gros Bouquet’. Ils l’ont ensuite mise au sol en lui appuyant le cou, dans mon propre terrain. »
Au final, la maison est détruite, et les affaires personnelles de la famille sont jetées dehors.
Pour Nzue Edou, cette expulsion illustre les failles d’un système judiciaire perçu comme inéquitable. « Comment peut-on me déposséder d’un terrain que j’ai légalement acquis il y a 17 ans ? » s’interroge-t-il. Ce sentiment d’injustice est renforcé par l’attitude des forces de l’ordre, accusées d’avoir agi avec un zèle disproportionné sans respecter les droits fondamentaux de sa famille.
Ce drame révèle l’ampleur des litiges fonciers au Gabon, où des terrains vendus à plusieurs acquéreurs deviennent la source de conflits interminables. Des pratiques parfois facilitées par des complicités au sein des administrations et des failles dans le suivi des transactions.
Ironie du sort, cet incident survient alors que le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) avait fait de la lutte contre les injustices foncières un cheval de bataille. La transition avait promis de restaurer la dignité des citoyens gabonais en s’attaquant aux irrégularités dans la gestion du foncier, mais des cas comme celui de Nzue Edou révèlent que les gabonais continuent de subir des décisions opaques et des pratiques arbitraires.
L’affaire de Nzue Edou Patrick Patrici est un appel à l’action pour le CTRI, afin qu’il honore ses engagements envers les Gabonais. La transparence et la justice doivent prévaloir, pour éviter que de telles tragédies ne se répètent et pour que des familles comme celle de Nzue Edou puissent enfin trouver la paix et la sécurité qu’elles méritent.